lundi 22 octobre 2012

Le coiffeur

Ce lundi, ma semaine aura été le coiffeur. 
J'avais beau répéter à Hui Ling, ma nouvelle pote indonésienne que non mes cheveux n'avaient pas besoin d'être coupé, quand on se comprend qu'à moitié, on résiste pas longtemps. 
Et puis, je les avais déjà repéré. Entre un 餐厅 de pâtes et une Bank of China, il étaient là. Par centaines. 
En taxis, ils sont à hauteurs d'yeux.C'est alors faciles de comprendre la logique d'ordonnancement des RDC des buildings de Xiamen :  RESTO/BANK/COIFFEUR/BANK/COIFFEUR/RESTO/COIFFEUR/COIFFEUR.
Certainement donc un truc à faire en Chine.

L'expérience "coiffeur" débute, elle, par l'alternance :  BLOUSE GRISE/  BLOUSE ROUGE/  BLOUSE GRISE.
C'est comme ça une ribambelle de petits chinois masculins qui se succèdent, habillés de pied-en-cape, offrant une vrai haie d'honneur au client. 
Au fond du magasin, j'aperçois un peu surprise les brancards-lits du dentiste. Les mêmes. Je m'allonge donc, la tête dans l'évier, les chaussures sur le lits.
Vient alors le traditionnel shampooing. Eau chaude, rinçage à l'eau froide. Une technique de nettoyage maîtrisée, mais sommes toute, classique. 
Je commençais alors à me détendre, quand Ô surprise, je sens un truc chatouiller le fond de mon être : c'est dans mes oreilles que le petit chinois commence à mettre ses doigts. Ils les lave par petits cercles méticuleux comme on lave une porcelaine de Limoges. Quelle douceur, quelle minutie... Difficile à croire que cela venait d'un homme. J'ouvrais alors les yeux pour m'en assurer, quand le chinois commence à me frapper le crâne. Tout mon corps s'enfonce dans le siège en mousseline. Je suis maintenant une boule de pain. Il me malaxe, m'aplatit, et à cet instant je regrette presque d'être venue. Et puis je m'habitue, je ne fais plus qu'un avec les mains du coiffeur, plus qu'un avec la Chine tout entière tant l'harmonie introduite dans mes entrailles capillaire est salvatrice. 
Et puis on me réveille.

C'est là que le calvaire commence. Installée sur une chaise en vitrine, je vois dans le miroir la mine du chinois "blouse rouge" se décomposer au moment ou il retire la serviette de ma tête. Il appelle un collègue qui me reluque un peu catastrophé, s'essayant à peigner mes cheveux.  Le langage chinois n'a à ce moment plus de secret pour moi : et oui, je suis blonde, et oui, j'ai les cheveux bouclés, secs, et emmêlés.
Les passants du dehors s'arrête pour le spectacle, et c'est tout le salon qui s'agglutine autour de moi, au désespoir de la pauvre Hui Ling, qui elle, à terminé depuis 10 bonnes minutes.
Après une tentative douloureuse de démêlage, le chinois s'y attaque directement au sèche cheveux. Il tente même un brushing. Il tire, il arrache, et je tente de cacher les larmes qui me monte aux yeux.
Mais comment dire stop à un chinois qui met tant de coeur un l'ouvrage ? pour lui cette matière était un nouveau défi. Je me dis alors que moi aussi je devais relever le défi du silence.

Une demi heure plus tard, après avoir esquivé les ciseaux (quand même), je vais payer les 20 yuan bien mérité au coiffeur, arborant ma chevelure de sauvage des mauvais jour, et mon plus joli sourire de soulagement.
En sortant de la boutique, c'est tout le salon qui se retourne sur mes pas : blouse grise, blouse rouge, mi-figue, mi-raisin.

Peu convaincu par le talent de coiffure de nos amis chinois, je décide tout de même d'y retourner. 
Sauf que la prochaine fois, ce ne sera qu'un shampoing.